Une vérité passagère n’est pas un mensonge

Une vérité passagère n’est pas un mensonge

elle est le reflet éphémère d’un regard posé à un instant donné, dans une lumière donnée.

L’art de manier la contradiction, c’est celui de l’équilibriste entre les niveaux de conscience, là où le paradoxe devient pont et non fracture. Ces niveaux, nous pouvons les distinguer avec clarté, même s’ils se chevauchent et se répondent comme les mouvements d’une seule et même respiration.

Le premier plan, fondamental, est celui du corps, du vivant brut. Il s’agit de l’instinct pur : survivre, se nourrir, abriter sa chair, préserver l’élan vital. C’est le plan biologique, terre première de l’existence, où l’on ne pense pas , on respire, on tient bon, on lutte parfois…

Vient ensuite le plan socioculturel, espace où l’être apprend à se vêtir de rôles, à se mouvoir parmi les autres, à parler la langue du monde. Ici, l’on construit sa personnalité, l’on s’adapte aux règles, aux normes, aux systèmes qui organisent la vie commune. C’est le lieu du personnage, du façonnement du personnage dans la glaise du collectif, le théâtre .

Puis, plus haut ,ou plus profond, s’ouvre le plan individuel. Là, quelque chose s’émancipe ;l’être sent en lui une étincelle propre, une voix singulière, un regard unique. Il devient créateur, penseur, porteur d’élan. Il ose la différence, affirme sa vision, cherche à transformer le monde à partir de ce qui l’anime intérieurement.

Et puis, au-delà même de l’individu, s’étire le plan transpersonnel. Ce n’est plus ici l’ego qui parle, ni le corps, ni même l’esprit. C’est un autre souffle, vaste, impersonnel, presque impensable. On y perçoit l’illusion du libre-arbitre, le théâtre des rôles, la chorégraphie de l’existence dans son ensemble. C’est le domaine des grandes forces, des énergies collectives, de la grâce cosmique. L’observateur s’y efface doucement, sourit à ses propres attachements, et contemple le jeu de la vie comme un rêve, clair obscure.

Mais ces plans ne coexistent pas sans heurts. Lorsqu’on lutte pour survivre, on n’a guère de temps pour bâtir une image de soi. Lorsqu’on façonne cette image, il est difficile d’oser la déconstruire pour accéder à une création authentique. Et lorsqu’on entrevoit l’ultime, le non-agir du transpersonnel, tout en nous résiste à l’abandon : l’ego s’accroche à ses choix, à ses responsabilités, à son besoin d’exister.

L’évolution, alors, ne suit pas une ligne droite …c’est un mouvement spiralé, un art subtil, celui de tisser des ponts entre ces plans sans les confondre. Chaque niveau contient sa propre vérité, ces codes et sa réactivité instinctive de survie, valable et nécessaire, mais transitoire. Et parfois, une ouverture surgit, un saut de maturité, un effacement. Une vérité meurt, une autre naît, jusqu’à ce qu’il n’en reste aucune.

Alors, dans ce dépouillement ultime, on ne cherche plus à comprendre. On s’abandonne au flot, sans nom, sans forme, dans un accord silencieux avec l’invisible. C’est cela, peut-être, la liberté véritable ne plus être captif d’aucune vérité, et se laisser emporter, léger, dans le courant insondable du vivant , entre les mains du divin dans un corps à l’œuvre qui se laisse pénétrer par la lumière

Ely

( photo prise il y a 5 minutes Ely)

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